Commotion et céphalée post-traumatique chez l’enfant et adolescent
Les céphalées, maux de tête et migraines sont communs après une commotion cérébrale et traumatisme crânien
Une céphalée post-traumatique est définie comme une douleur à la tête qui survient après une blessure ou un traumatisme à la tête et/ou au cou. Par définition ce sont des douleurs de tête qui se se présentant dans les 7 jours suivant la blessure, mais en réalité clinique, je vois régulièrement des céphalées qui peuvent se présenter même bien plus tard après la survenu du traumatisme crânien. Les maux de tête peuvent être un symptôme isolé ou peuvent être accompagnés d’autres symptômes, notamment des étourdissements et déséquilibre, de la fatigue, une capacité de concentration réduite, un ralentissement psychomoteur, des problèmes de mémoire, de l’insomnie, de l’anxiété, des changements de personnalité et de l’irritabilité. Si les symptômes persistent au-delà de 3 mois, elle est classée comme céphalée post-traumatique persistante, qui est observée dans 18 à 65 % des cas.
Cette céphalée secondaire courante a des impacts significatifs sur la qualité de vie, non seulement pour les patients mais aussi pour les familles. La céphalée post-traumatique peut survenir après une blessure légère, modérée ou grave, et la gravité de la blessure ne prédit pas nécessairement la gravité des symptômes. Paradoxalement, une étude avait même montré qu’un traumatisme modéré provoquait plus souvent des symptômes consécutifs forts qu’un traumatisme sévère. La céphalée post-traumatique a des caractéristiques très similaires aux migraines, avec des symptômes comprenant l’aspect pulsatile des migraines, des nausées/vomissements associés, une photo/phonophobie et une aggravation de la douleur avec l’activité; ou similaires à des céphalées de tension avec une caractéristique non pulsatoire sans photophobie ni phonophobie.
Céphalée post-traumatique parmi les symptômes les plus communs après un traumatisme crânien
De tous les symptômes rapportés après une commotion cérébrale, le mal de tête est le plus courant. La majorité des patients souffrant de céphalées post-traumatiques aiguës et chroniques/persistantes présentent des caractères ressemblant généralement à une migraine, suivie d’une céphalée de tension.
Des antécédents familiaux ou préexistants de migraine augmentent la probabilité de développer une céphalée post-traumatique, à savoir la migraine. Dans une cohorte rétrospective de 121 enfants qui ont subi un traumatisme crânien (86 % avec un traumatisme crânien léger), 33 % ont signalé une céphalée post-traumatique, et ces mêmes individus présentaient un dysfonctionnement du sommeil, de l’humeur, des domaines sensoriels et cognitifs, ainsi que des troubles neuropsychologiques 6 mois ou plus après la blessure.
Qu’est-ce qui se passe avec les céphalées post-traumatique ?
Des altérations de la structure cérébrale et des voies neurométaboliques ont été mises en évidence chez des patients après un traumatisme crânien.
L’imagerie par IRM cérébrale de patients adultes souffrant de céphalées post-traumatiques persistantes a révélé des différences dans la structure du cerveau par rapport aux patients souffrant de migraine et aux témoins sains. Les mesures d’épaisseur, de surface et/ou de volume ont été diminuées dans plusieurs zones (lobe orbitofrontal latéral droit, région frontale moyenne caudale gauche, lobe frontal supérieur gauche, précuneus gauche, gyrus supramarginal droit, région frontale supérieure gauche) des patients atteints de céphalées post-traumatiques persistantes par rapport aux patients migraineux.
Une étude similaire a comparé les IRM cérébrales de 32 patients atteints de céphalée post-traumatique par rapport à des témoins sains et a montré une diminution de la densité de matière grise dans le cortex cingulaire antérieur et le cortex préfrontal dorsolatéral chez les patients atteints de céphalée post-traumatique 3 mois après un traumatisme crânien. Il y a eu une normalisation ultérieure de la densité de la matière grise avec une résolution des maux de tête un an après le traumatisme crânien.
Une autre étude a également trouvé une diminution de l’épaisseur corticale chez les patients atteints de céphalées post-traumatiques persistantes et par rapport à des témoins sains dans plusieurs zones (frontal supérieur gauche et droit, frontal moyen caudal et précentral, supramarginal droit, pariétal supérieur et inférieur droit, région précuneus droite) et a mis en évidence une corrélation négative entre l’épaisseur frontale supérieure gauche et droite avec la fréquence des céphalées. Ces résultats suggèrent un remodelage cérébral pouvant contribuer au développement des céphalées post-traumatiques persistantes.
Une diminution du débit sanguin cérébral a également été démontrée dans la population pédiatrique après un traumatisme crânien léger avec un mécanisme proposé secondaire à une perte d’autorégulation cérébrovasculaire, un vasospasme et/ou des troubles régionaux de la perfusion.
Quelle solution pour les céphalées post-traumatique ?
Les directives mises à jour de CDC (Centers fo Disease Control) américain renoncent à la théorie selon laquelle le « repos » est nécessaire pour se remettre d’une commotion cérébrale aiguë. Alors que le repos strict est encouragé 24 à 48 heures après la blessure, il existe de plus en plus de preuves que l’exercice aérobique peut favoriser la récupération. Il faut signaler une « fenêtre de vulnérabilité » avec un risque accru de commotion cérébrale 7 à 10 jours après la blessure, mais les activités quotidiennes peuvent commencer après une courte période de repos et progresser vers des niveaux croissants d’activité aérobique, sauf en cas d’exacerbation des symptômes.
Comme j’an ai parlé dans d’autres articles, un premier examen complet en neurologie fonctionnelle comprenant des tests d’équilibre, de coordination motrice, d’eye-tracking,… permet d’analyser finement l’état du patient ayant subi un traumatisme crânien léger et de mettre en place une rééducation appropriée et individualisée pour permettre de diminuer les symptômes et préparer le retour du patient au sport mais encore plus important à l’apprentissage. Malheureusement certains des adolescents que nous voyons dans le cadre de ces traumatismes (rugby, vélo, football,…) ont du mal à continuer une scolarité normale notamment à cause des céphalées et des troubles d’équilibre. La rééducation de ces patients est similaires à ce que l’on propose aux adultes avec une rééducation vestibulaire, occulomotrice, proprioceptive et nutritionnelle pour permettre un retour le plus rapide possible à l’école et progressivement au sport.
Références :
Doll, E., Gong, P., Sowell, M. et al. Post-traumatic Headache in Children and Adolescents.Curr Pain Headache Rep 25, 51 (2021).
Blume HK. Posttraumatic headache in pediatrics: an update and review. Curr Opin Pediatr. 2018 Dec;30(6):755-763.
Heyer GL, Young JA, Rose SC, McNally KA, Fischer AN. Post-traumatic headaches correlate with migraine symptoms in youth with concussion. Cephalalgia. 2016 Apr;36(4):309-16.