Faut-il éliminer la douleur ou la cause du déclenchement de la douleur ?

Masquer la douleur ou corriger l’origine de la douleur ?

La douleur est nécessaire !

C’est la sonnette d’alarme. C’est ce qui fait qu’en s’approchant du feu, notre cerveau se rend compte qu’il faut retirer très vite la main pour ne pas se brûler. C’est aussi ce qui fait que notre corps nous a signalé depuis des millénaires qu’il ne faut pas manger telle ou telle chose et s’intoxiquer et avoir des douleurs au ventre… Vous connaissez le principe !

La douleur est un système d’alerte qui nous dit de faire une pause et de prêter attention à notre corps.

Je traduis ici un article de Neurosciencenews.com citant une étude de l’université de Harvard et donnerait ma reflexion en bas de page :

Propriétés protectrices inattendues de la douleur

Et si la douleur était plus qu’une simple sonnette d’alarme ? Et si la douleur était en soi une forme de protection ?

Une nouvelle étude menée par des chercheurs de la Harvard Medical School suggère que cela pourrait bien être le cas.

La recherche, publiée le 14 octobre 2022 dans le journal Cell, montre que les neurones de la douleur dans l’intestin de la souris régulent la présence de mucus protecteur dans des conditions normales et stimulent les cellules intestinales à libérer plus de mucus pendant les états d’inflammation.

Les travaux détaillent les étapes d’une cascade de signalisation complexe, montrant que les neurones de la douleur s’engagent dans une communication directe avec les cellules intestinales contenant du mucus, appelées cellules caliciformes.

« Il s’avère que la douleur peut nous protéger de manière plus directe que son travail classique pour détecter les dommages potentiels et envoyer des signaux au cerveau. Notre travail montre comment les nerfs médiateurs de la douleur dans l’intestin communiquent avec les cellules épithéliales voisines qui tapissent les intestins », a déclaré le chercheur principal de l’étude, Isaac Chiu, professeur agrégé d’immunobiologie à l’Institut Blavatnik du Harvard Medical School. « Cela signifie que le système nerveux a un rôle majeur dans l’intestin au-delà du simple fait de nous donner une sensation désagréable et qu’il est un acteur clé dans le maintien de la barrière intestinale et un mécanisme de protection lors de l’inflammation. »

Une conversation directe

Nos intestins et nos voies respiratoires sont parsemés de cellules caliciformes. Les cellules caliciformes contiennent du mucus semblable à un gel composé de protéines et de sucres qui agit comme un revêtement protecteur qui protège la surface des organes de l’abrasion et des dommages. La nouvelle recherche a révélé que les cellules caliciformes intestinales libèrent du mucus protecteur lorsqu’elles sont déclenchées par une interaction directe avec les neurones sensibles à la douleur dans l’intestin.

Dans une série d’expériences, les chercheurs ont observé que les souris dépourvues de neurones de la douleur produisaient moins de mucus protecteur et subissaient des changements dans leur composition microbienne intestinale – un déséquilibre entre les microbes bénéfiques et nocifs connu sous le nom de dysbiose.

Les chercheurs ont découvert que les surfaces des cellules caliciformes contiennent un type de récepteur, appelé RAMP1, qui garantit que les cellules peuvent répondre aux neurones de la douleur adjacents, qui sont activés par des signaux alimentaires et microbiens, ainsi que par une pression mécanique, une irritation chimique ou des changements drastiques de température.

Les expériences ont en outre montré que ces récepteurs se connectent à un produit chimique appelé CGRP, libéré par les neurones de la douleur à proximité, lorsque les neurones sont stimulés. Ces récepteurs RAMP1, sont également présents dans les cellules caliciformes humaines et de souris, les rendant ainsi sensibles aux signaux de douleur.

Des expériences ont en outre montré que la présence de certains microbes intestinaux activait la libération de CGRP pour maintenir l’homéostasie intestinale.

« Cette découverte nous indique que ces nerfs sont déclenchés non seulement par une inflammation aiguë, mais aussi à un niveau de base », a déclaré Chiu. « Le simple fait d’avoir des microbes intestinaux réguliers semble chatouiller les nerfs et oblige les cellules caliciformes à libérer du mucus. »

Cette boucle de rétroaction, garantit que les microbes signalent aux neurones, que les neurones régulent le mucus et que le mucus maintient les microbes intestinaux en bonne santé.

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Les résultats montrent que la douleur intestinale n’est pas un simple système de détection et de signalisation, mais joue un rôle protecteur direct dans l’intestin. Crédit : Chiu Lab/Harvard Medical School / Neurosciencenews.com, Unexpected Protective Properties of Pain, October 14, 2022

En plus de la présence microbienne, les facteurs alimentaires ont également joué un rôle dans l’activation des récepteurs de la douleur. Lorsque les chercheurs ont administré à des souris de la capsaïcine, l’ingrédient principal des piments rouges connu pour sa capacité à déclencher une douleur intense et aiguë, les neurones de la douleur des souris ont été rapidement activés, provoquant la libération par les cellules caliciformes d’abondantes quantités de mucus protecteur.

En revanche, les souris dépourvues de neurones de la douleur ou de récepteurs des cellules caliciformes pour le CGRP étaient plus sensibles à la colite, une forme d’inflammation intestinale. Cette découverte pourrait expliquer pourquoi les personnes atteintes de dysbiose intestinale peuvent être plus sujettes à la colite.

Lorsque les chercheurs ont administré du CGRP signalant la douleur à des animaux dépourvus de neurones de la douleur, les souris ont connu une amélioration rapide de la production de mucus. Le traitement a protégé les souris contre la colite même en l’absence de neurones de la douleur.

La découverte démontre que le CGRP est un instigateur clé de la cascade de signalisation qui conduit à la sécrétion de mucus protecteur.

« La douleur est un symptôme courant des affections inflammatoires chroniques de l’intestin, telles que la colite, mais notre étude montre que la douleur aiguë joue également un rôle protecteur direct », a déclaré le premier auteur de l’étude, Daping Yang, chercheur postdoctoral au Chiu Lab.

Un inconvénient possible à la suppression de la douleur

Les expériences de l’équipe ont montré que les souris dépourvues de récepteurs de la douleur présentaient également des lésions plus graves dues à la colite lorsqu’elle se produisait.

Étant donné que les analgésiques sont souvent utilisés pour traiter les patients atteints de colite, il peut être important de considérer les conséquences néfastes possibles du blocage de la douleur, ont déclaré les chercheurs.

« Chez les personnes souffrant d’inflammation de l’intestin, l’un des principaux symptômes est la douleur, vous pourriez donc penser que nous voudrions traiter et bloquer la douleur pour soulager la souffrance », a déclaré Chiu. « Mais une partie de ce signal de douleur pourrait être directement protectrice en tant que réflexe neural, ce qui soulève des questions importantes sur la façon de gérer soigneusement la douleur d’une manière qui n’entraîne pas d’autres dommages. »

De plus, une classe de médicaments courants contre la migraine qui suppriment la sécrétion de CGRP peut endommager les tissus de la barrière intestinale en interférant avec cette signalisation protectrice de la douleur, ont déclaré les chercheurs.

« Étant donné que le CGRP est un médiateur de la fonction des cellules caliciformes et de la production de mucus, si nous bloquons de manière chronique ce mécanisme de protection chez les personnes souffrant de migraine et si elles prennent ces médicaments à long terme, que se passe-t-il ? » dit Chiu. « Les médicaments vont-ils interférer avec la muqueuse et les microbiomes des gens? »

Les cellules caliciformes ont plusieurs autres fonctions dans l’intestin. Ils fournissent un passage pour les antigènes – des protéines présentes sur les virus et les bactéries qui déclenchent une réponse immunitaire protectrice par le corps – et ils produisent des produits chimiques antimicrobiens qui protègent l’intestin des agents pathogènes.

« Une question qui découle de nos travaux actuels est de savoir si les fibres de la douleur régulent également ces autres fonctions des cellules caliciformes », a déclaré Yang.

Une autre piste de recherche, a ajouté Yang, consisterait à explorer les perturbations de la voie de signalisation du CGRP et à déterminer si des dysfonctionnements sont en jeu chez les patients présentant une prédisposition génétique aux maladies inflammatoires de l’intestin.

Alors éliminer la douleur ou la source de la douleur ?

En tant que chiropracteur et diplômé en neurologie fonctionnelle, la réponse est évidente ! Eliminer la perception de la douleur par des médicaments pourrait avoir un résultat ? Mais pendant combien de temps et à quel prix ? Premièrement ce que tous mes patients qui me consultent disent : c’est qu’au début le problème; que ce soit migraine, céphalée, mal de dos, etc.; était occasionnel et que je prenais un médicament simple pour m’en débarrasser. Puis au cours des années, le problème s’est installé de plus en plus et j’ai pris des médicaments de plus en plus forts. Qui pour certains ne fonctionnaient pas et d’autres qui fonctionnaient. Mais qui ne fonctionnaient plus après un certain temps… et maintenant plus rien ne fonctionne ! Sans vouloir faire un long discours, ceci est dû à l’habituation des récepteurs nerveux qui ne réagissent plus aux mêmes neurotransmetteurs après un certain temps et à leur quantité… Mais encore plus grave, les effets secondaires parfois minimes au début mais de plus en plus handicapant au cours du temps et parfois graves de ces anti-douleurs qui n’ont fait que masquer la douleur sans s’attaquer à la source de la douleur !

En tant que chiropracteur, mon rôle est de déterminer ce qui pourrait provoquer la douleur au niveau du système nerveux et éliminer dans la mesure du possible ce qui peut provoquer cette sensation de la douleur. Pas simplement de la masquer. Que ce soit par des ajustements chiropratiques qui permettent de réduire les irritations nerveuses ou de la rééducation du système nerveux pour ne pas réagir de façon exagérée aux stimuli internes (par exemple changement hormonaux pendant les règles), ou externes (par exemple le stress, la lumière,…).

Cette étude démontre encore une fois que des médicaments peuvent avoir un effet sur la douleur, mais quid des conséquences sur le fonctionnement du système digestif, et de son interaction de plus en plus dans l’actualité sur le système nerveux et du fonctionnement du cerveau et les maladies neurodegénératives ???

Références :

Yang D, Jacobson A, Meerschaert KA, Sifakis JJ, Wu M, Chen X, Yang T, Zhou Y, Anekal PV, Rucker RA, Sharma D, Sontheimer-Phelps A, Wu GS, Deng L, Anderson MD, Choi S, Neel D, Lee N, Kasper DL, Jabri B, Huh JR, Johansson M, Thiagarajah JR, Riesenfeld SJ, Chiu IM. Nociceptor neurons direct goblet cells via a CGRP-RAMP1 axis to drive mucus production and gut barrier protection. Cell. 2022 Oct 11:S0092-8674(22)01196-5.

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